D'après ce qui ce dit, Ionesco aurait écrit Rhinocéros pour dénoncer la montée du fascisme.
Face à certains débats qui fleurissent un peu partout sur les réseaux sociaux au sujet d'un texte polémique, j'ai trouvé que cet extrait illustrait bien la teneur des échanges.
Tout le monde défend son point de vue avec un avis très tranché sur la question sans écouter l'autre. Quand on a le malheur de chercher à faire se rejoindre les idées on se fait copieusement insulter. Ceux qui ont adoré répondent même de manière particulièrement agressive en faisant des raccourcis honteux pour se faire passer pour des victimes incomprises: j'en ai fait les frais une fois et j'invite d'ailleurs cette charmante personne à prendre le temps de lire la totalité des mots qu'elle croise dans un texte, s'acheter un bon dictionnaire de langue française, et surtout à ne pas abuser de la ponctuation.
Ces réactions extrémistes me font penser aux bons apôtres des sectes qui ont subit un lavage de cerveau et qui suivent aveuglement les leaders d'opinions sans se poser de questions. Ils acceptent de voir uniquement ce qu'on veut bien leur montrer et rien d'autre. Ils banalisent un sujet tout en le transformant en sujet tabou. Vous saisissez la subtilité de la nuance? Moi, elle m'échappe, j'avoue.
Je vous laisse à la lecture enrichissante de cet extrait. En ce qui concerne les messages et commentaires insultants qui ne manqueront pas d'arriver, ils seront validés avec la réponse qui parcourt toute la pièce: "Oh! Un rhinocéros!" Alors si vous avez envie de vous faire afficher de la sorte n'hésitez pas.
« Béranger
Je ne vous insulte pas. Au contraire. Vous savez à quel point je vous estime.
Jean
Si vous m’estimez, pourquoi me contredisez-vous en prétendant qu’il n’est pas dangereux de laisser courir un rhinocéros en plein centre de la ville, surtout un dimanche matin, quand les rues sont pleines d’enfants… et aussi d’adultes…
Béranger
Beaucoup sont à la messe. Ceux-ci ne risquent rien…
Jean, l’interrompant.
Permettez… A l’heure du marché, encore.
Béranger
Je n’ai jamais affirmé qu’il n’était pas dangereux de laisser courir un rhinocéros dans la ville. J’ai dit tout simplement que je n’avais pas réfléchi à ce danger. Je ne me suis pas posé la question.
Jean
Vous ne réfléchissez jamais à rien !
Béranger
Bon, d’accord. Un rhinocéros en liberté, ça n’est pas bien.
Jean
Ça ne devrait pas exister.
Béranger
C’est entendu. Cela ne devrait pas exister. C’est même une chose insensée. Bien. Pourtant, ce n’est pas une raison de vous quereller avec moi pour un fauve. Quelle histoire me cherchez-vous à cause d’un quelconque périssodactyle qui vient de passer tout à fait par hasard, devant nous ? Un quadrupède stupide qui ne mérite pas qu’on en parle ! Et féroce en plus… Et qui a disparu aussi, qui n’existe pas. Parlons d’autre chose, mon cher Jean, parlons d’autre chose, les sujets de conversations ne manquent pas… »
Et oui, tant qu'on fait comme si ça n'existait pas, le problème est un fantôme qui rode sournoisement comme un virus... Alors arrêtez de banaliser certains faits tout en vous en offusquant dans un contexte qu'il vous plaît de critiquer.
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